Interview - Jean-Christian Fraiscinet : "La durée explique le succès des Bodin’s"

Toulouseblog

7 novembre 2014

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En imaginant l’histoire loufoque et rurale des Bodin’s, le duo a créé un univers singulier et décalé qui ne cesse de séduire le public plus de 20 ans. Rencontre avec Jean-Christian Fraiscinet qui incarne Christian avant leur passage au Bascala de Bruguières samedi soir.


Pour commencer, vous êtes en pleine tournée. Vous allez arriver sur Toulouse en fin de semaine Quelques mots sur votre relation avec la ville rose ?

Toulouse, c’est rigolo car cette région nous a vu débuter. Notre premier spectacle, on l’a créé au Café théâtre des 3T . Donc c’est de beaux souvenirs pour nous de revenir à chaque fois ici. Puis, on parle de tout le monde avec ces deux personnages ruraux. Donc ils peuvent être aussi bien de Toulouse que d ’Alsace ou d’Auvergne. C’est la grande force des Bodin’s.

Revenons aux débuts. Comment est né votre duo ?

C’est né en deux temps. D’abord, Vincent a créé le personnage de Maria pour le jouer seul sur scène comme un one man show. On s’est alors croisé sur un festival, où je jouais une pièce, et la rencontre s’est produite. On a décidé dès lors de collaborer ensemble sur une véritable histoire. Le duo est né de cette rencontre.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore les Bodin’s, pouvez-vous me raconter l’histoire ?

C’est l’histoire d’une mère, une vieille paysanne de 87 ans, un peu acariâtre, et de son fils de 50 ans un peu timide. On fait évoluer leur relation au fil des spectacles. Ce sont des shows évolutifs autour de ses deux personnes. On raconte un moment de leur vie à la façon d’une pièce de théâtre. Il n ’y a pas de sketchs à proprement dits.

Et pour ce dernier spectacle, quel est l’histoire ?
Pour « Retour au pays », on revient sur la brouille entre le fils et la mère survenue lors du précédent spectacle. La femme de celui-ci ne supportait plus sa belle-mère, et ils partaient vivre à Paris. Exilés à Paris, la mère se retrouvant seule, et se sentant vieillir, tente de le faire revenir en simulant un Alzheimer et lui fait miroiter la donation du domaine familiale.

Les personnages sont vieillissants. Pensez-vous un jour les quitter ?

On n’espère pas les quitter. Plus ça va, plus on a des choses à leur faire dire. Ils sont de plus en plus ouverts au monde extérieur. Au départ, on ne savait pas où cela aller nous conduire. Là, on arrive à les faire réagir sur le monde extérieur. Donc, la source d’inspiration est inépuisable pour le moment en tout cas. Et puis, on les fait réagir sur internet ou même au cinéma.

D’ailleurs internet vous aide dans votre démarche artistique !

Oui, il y a plein de pastille pour le net. Il y a un sketch où la mère explique Facebook à son fils. Un extrait tiré de « Retour au Pays ». Cet extrait a cartonné. Cela donne encore plus envie de continuer notre démarche.

Comment se passe le processus créatif au sein du duo ?

On n’écrit jamais l’un sans l’autre. On scénarise toute l’histoire. On décortique, on crée des rebondissements mais toujours avec une grande tendresse pour les personnages. Puis notre récréation reste les dialogues. Là on s’y amuse. Ils sont très fleuris comme chez Audiard. On aime cette verve et le travail sur les dialogues !

A titre personnel, comment endosse-t-on son personnage ?

Vincent avait déjà créé le sien avant mon arrivée. Je venais d’un théâtre plus classique et donc il fallait que je trouve quelque chose. J’ai énormément observé car je n’étais pas destiné à faire ça. C’est un rôle peu loquace. Un vrai rôle de composition. Ça se fait donc par l’observation d’abord de Maria mais aussi des gens qui nous entourent. Maintenant, on les fait depuis 20 ans, on ne pense plus à rentrer dans le personnage. C’est une deuxième peau. Parfois, on a l’impression qu’ils sont toujours à nos côtés. Le plus excitant, c’est quand on quitte le costume sur scène. A la fin du spectacle, on se démaquille devant le public. Le plus touchant, c’est quand les gens sont surpris et ont oublié que derrière les personnages il y a des comédiens.

Comment expliquez-vous le succès des Bodin’s depuis près de 20 ans maintenant ?

La durée explique le succès je crois. On n’a jamais été réellement médiatisé. On le devient de plus en plus mais pas non plus à outrance. Le bouche à oreille a été une des premières clés de notre succès. Il faut donc prendre son temps. Le public s’est rapidement attaché aux personnages car ils parlent à tout le monde. Le public s’attache et est très large. Il y a aussi des enfants de tout âge. Comme on raconte une histoire, les gens nous suivent de spectacle en spectacle pour découvrir toujours la suite. On a quand même réussi à faire des zéniths sans médiatisation.

Ce sont les dernières représentations pour Retour au Pays. La suite, c’est un nouveau spectacle rapidement ?

On finit ce spectacle qu’on tourne déjà depuis 4 ans. On le termine actuellement avec une dernière slave de dates. Puis, on prépare le prochain. Un tout nouveau spectacle jamais vu. On fera la tournée des Zéniths avec un vrai décor, un truc incroyable pour 2015-2016. Il est presque terminé d’ailleurs. Et, on voyagera alors dans tous les pays francophones.

Enfin, que pensez-vous des Bodin’s ?

Ils nous étonnent de jour en jour. On se rend compte qu’on ne vivra pas assez vieux pour les faire mourir. Ils ont encore plein de choses à vivre grâce au monde qui nous entoure et surtout grâce au public.