Les Bodin’s vraiment chez eux au Ciné Sologne de Romorantin
Les Bodin’s étaient lundi 21 mars, à Ciné Sologne pour rencontrer leur public. Et baptiser une salle du cinéma de Romorantin où ils sont chez eux. Malgré le succès, ils n’oublient pas ce qu’ils doivent à son patron Francis Fourneau. Interview du duo.
Vincent Dubois s’avance dans le hall. Les quelques clients présents lundi en milieu d’après-midi dans le cinéma de Romorantin ne l’imaginent pas un instant. Mais ils viennent de croiser un comédien qui, en duo avec Jean-Christian Fraiscinet, "pèse" 1.650.000 spectateurs. C’est le nombre d’entrées que le film Les Bodin’s en Thaïlande a réalisé depuis sa sortie le 17 novembre 2021.
"On est un peu ici chez nous", glisse Vincent Dubois, alias Maria Bodin, alors que Jean-Christian Fraiscinet, ou plutôt Christian Bodin, le rejoint. Quelques heures plus tard, ils ont rencontré une nouvelle fois leur public romorantinais autour d’une projection de leur troisième film. Et du baptême d’une des salles de Ciné Sologne à leur nom. Interview des deux Bodin’s, qui n’entendent pas se laisser griser par leur phénoménal succès.
- Les Bodin’s étaient lundi soir au cinéma de Romorantin, auprès du public et de Francis Fourneau (près de Maria Bodin) qui a compté dans leur carrière.
© NR, Laëtitia Piquet
Vous dites que vous êtes chez vous, dans le cinéma de Romorantin. Vous avez en effet des liens très forts avec l’un de ses patrons, Francis Fourneau. Quel rôle a-t-il joué pour vous ?
Vincent Dubois : "Francis [Fourneau] nous a beaucoup aidés (1). Quand on travaillait sur notre premier film Mariage chez les Bodin’s, qui date de 2008, on n’avait jamais fait de cinéma. On s’est lancé dans la fabrication du film : un tournage de six jours et un budget de 90.000 euros. On l’a fait parce qu’on avait très envie de travailler avec le réalisateur Éric Le Roch, de nous amuser et de faire nos armes dans le cinéma. Mais on n’avait pas de diffuseur. Quand le film a été fini, Francis a fait un peu notre ambassadeur auprès des autres cinémas. On a commencé avec 15 copies, on a fini avec 60 et 150.000 spectateurs ! Nous, on connaissait le milieu du théâtre. Le cinéma, c’est une industrie que nous ne connaissions pas du tout. Francis a continué de nous aider pour le second film (2)… Il a toujours été là."
Depuis, quel chemin parcouru ! Vous attendiez-vous à un tel succès pour Les Bodin’s en Thaïlande ?
Jean-Christian Fraiscinet : "On ne s’attendait pas à ça ! En plus dans une période compliquée. Finalement, il est sorti au moment où les gens revenaient dans les salles. Le fait d’avoir un film d’humour qui dépayse, c’est peut-être aussi ce qu’attendait le grand public. On a fait plus de 150 avant-premières, aussi bien dans les petits cinémas de campagne que dans les grands complexes : là, on a senti qu’il se passait quelque chose. On a bien fait de prendre ce temps pour amorcer la pompe car personne ne nous attendait à part notre public."
Vincent Dubois : "Quand les exploitants de salles veulent porter un film, ils peuvent le faire, le défendre. Notre implication dans les avant-premières nous a sans doute aussi donné un capital sympathie auprès d’eux."
Après ce raz-de-marée, quelle est la suite pour les Bodin’s ?
Vincent Dubois : "Dans l’immédiat, c’est la reprise de la tournée de notre spectacle Les Bodin’s Grandeur Nature. Nous avons encore 130 dates signées, ce qui nous amènera jusqu’en avril 2023. On est déjà en train d’écrire notre prochain film. Maintenant, on a réuni une vraie famille de cinéma avec le réalisateur Frédéric Forestier, les producteurs, le distributeur… Tout ce qu’il faut pour bosser sur un nouveau film. Mais tout doit partir d’une histoire. On nous dit : “ après la Thaïlande, vous n’avez qu’à faire Les Bodin’s au Pérou ”. Mais un film, ce n’est pas une affiche et une destination. On planche sur ce qu’on peut faire pour se réinventer, pour étonner les gens."
Jean-Christian Fraiscinet : "On a aussi en réflexion notre prochain spectacle, une proposition d’émission de télévision… Tout arrive un peu en même temps. On ne va pas pouvoir tout faire."
Vincent Dubois : "Au théâtre, on a des compétences. On mène un peu la danse. C’est ce qu’on connaît le mieux. Au cinéma et à la télévision, il faut toujours être très vigilants pour ne pas vendre son âme au diable."
Comment, après votre succès, fait-on pour ne pas “ vendre son âme au diable ” ?
Jean-Christian Fraiscinet : "Il faut qu’artistiquement, ça nous plaise et qu’on soit heureux dans ces projets-là."
Vincent Dubois : "Cela tombe bien que cela nous arrive après 30 ans [de carrière]. On a un peu d’expérience. Les Bodin’s deviennent une marque un peu “ bankable ”. Il faut être vigilants."
Qu’est-ce qui explique votre longévité, votre alchimie à tous les deux, selon vous ?
Vincent Dubois : "Ce qui a sûrement beaucoup compté c’est qu’on a eu la même enfance. Tous les deux, on vient d’une famille modeste, avec une vraie vie de famille qui a de l’importance dans nos vies. On est dans la même génération. On rit des mêmes choses. On a grandi avec Le Corniaud et La Grande Vadrouille…"
Jean-Christian Fraiscinet : "On a toujours vécu de notre métier. On a construit cela logiquement, petit à petit. Cela a été plutôt agréable de franchir les étapes. Et puis, on se réfugie derrière nos personnages."
Vincent Dubois : "On sait quand dans les métiers artistiques, c’est l’ego qui fout la merde. Dès le début, on a été d’accord sur cette base : on ne fait pas ce métier pour être connus. Les stars, ce sont nos personnages."
(1) Francis Fourneau connaissait notamment Jean-Christian Fraiscinet depuis les années 90.
(2) Amélie au pays des Bodin’s, sorti en 2010.
[Pierre Calmeilles]