Les Bodin’s pour cinq dates en Belgique
Le Suricate
Ils remplissent les salles de France pour le plus grand bonheur des spectateurs. Adulés dans l’hexagone depuis plus de vingt ans, remplissant aujourd’hui les Zéniths, Les Bodin’s sont devenus des incontournables de la scène. Pourtant, le duo comique formé par Vincent Dubois et Jean-Christian Fraiscinet est encore peu connu chez nous. Un manquement qui est en passe de s’effacer puisque Les Bodin’s vont présenter leur spectacle intitulé Retour au Pays durant cinq jours dans notre plat pays.
L’occasion pour nous de leur poser quelques questions et de rencontrer ce duo hors du commun dont l’humour, la bonne humeur et la simplicité sont les principaux traits de caractère.
Les Bodin’s remplissent les salles et pourtant, on vous connait encore peu en Belgique. Comment expliquez-vous ce paradoxe ?
Oui, c’est vrai que c’est un peu un paradoxe. Mais vous savez, même en France, de nombreuses personnes ne nous connaissent pas encore.
D’un autre côté, remplir des zéniths alors que plein de gens ne vous connaissent pas, c’est symbole d’espoir. Cela veut dire que l’on pourrait encore remplir plus. (rires)
Les Bodin’s, ce sont d’abord Vincent Dubois et Jean-Christian Fraiscinet. Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Vincent a créé le personnage de Maria Bodin tout seul de son côté. Avec ce personnage, il a tourné six ans jusqu’au jour où nous nous sommes rencontrés dans un festival de théâtre, à Villard-de-Lans. Au cours de celui-ci, nous avons eu l’occasion de faire quelques improvisations ensemble, ce qui nous a beaucoup amusé. De là est né le duo des Bodin’s.
J’entends par là que vous ne vous connaissiez pas auparavant alors que vous veniez de la même région ?
Tout à fait. Nous ne nous connaissions pas mais nous avons eu la même enfance. L’un comme l’autre, nous avons été élevés à la campagne.
D’où l’ancrage de vos personnages dans la ruralité ?
Oui, exactement. Ces deux personnages sont des ruraux mais qui ont un regard sur le monde et un avis sur tout. De nos jours, même au plus profond de la Creuse, les gens ont internet et la télévision.
Au regard des spectacles et de leur succès, pensez-vous qu’il y a une certaine nostalgie du monde rural en France ?
Ce n’est pas la ruralité qui amène la nostalgie, c’est plutôt le bon vivre et la simplicité. À la campagne, les gens se rencontrent, on y boit bien, on y mange bien et en fin de compte, c’est peut-être cela qui manque aux gens aujourd’hui.
Notre monde va très vite et ces personnages vivent à notre époque tout en gardant leur rythme de vie. Finalement, est-ce qu’ils n’ont pas raison ? Ou du moins, n’y a-t-il pas une part de vérité dans leur façon d’aborder la vie de manière assez cool et d’avoir un regard un peu extérieur sur les choses ?
Par exemple, dans une scène où l’on aborde Facebook, Maria Bodin explique à son fils que c’est une réunion d’amis, sauf que tu n’as pas d’entrecôte, pas d’accordéon, rien à boire et que tu ne connais aucun de tes amis. Voilà ce qu’elle pense de Facebook, elle ne dit pas que c’est mal mais elle dit surtout qu’il ne faut pas compter là-dessus pour se retrouver.
Cela dit, nous n’avons pas vocation à être moralisateurs, le spectacle est avant tout drôle. Mais il est vrai qu’il y a un questionnement sur la place de l’humain.
Doit-on parler de votre spectacle comme d’une pièce de théâtre de boulevard ou plutôt comme un two-man-show présentant une succession de sketches ?
Du théâtre de boulevard peut-être pas car on pense tout de suite à Faydeau ou autres, mais ce qui est certain c’est que c’est bien du théâtre. C’est une histoire qui se raconte tout au long de la pièce avec un début et une fin. Nous définirions cela plutôt comme du théâtre burlesque.
Vous fêtez cette année vos vingt années de duo en continuant à tourner avec votre dernier spectacle Les Bodin’s, Retour au pays après Bienvenue à la Capitale. Un retour aux sources qui n’en est pas totalement un puisque vous confrontez Paris et la campagne. Pourquoi avoir choisi de présenter cette dualité ?
Il est vrai que nous confrontons un peu les deux. Dans le spectacle précédent, la mère était restée à la campagne alors que le fils était parti vivre à Paris. Après cinq années, il se retrouvent et le fils invite sa mère à Paris. Il est tout fier de lui montrer son petit appart de 9 m² puis elle lui dit simplement : « t’habites là-dedans ? Mais c’est grand comme notre caveau familial, sauf que chez nous c’est un plein pied et c’est fleuri ». Cela la dépasse en fait.
Dans le spectacle actuel, Maria se sentant vieillir a envie de récupérer son fils. Pour ce faire, elle use de plein d’artifices. C’est dès lors un retour aux sources qui confronte inévitablement la ville et la campagne. Cependant, cela n’a pas été écrit dans ce but-là. Mais le sujet fait que cette réflexion est inévitable.
Des histoires qui pastichent vos expériences personnelles ?
Oui. C’est marrant car on dit toujours « pasticher » pour les besoins du théâtre mais on s’aperçoit que finalement nous sommes toujours en-dessous de la réalité. Il y a des scènes que nous avons réellement vécues mais si nous les mettons dans notre spectacle, les gens vont croire que l’on exagère.
Quelle est la réception du public parisien vis-à-vis d’un spectacle ayant pour cadre la campagne ?
Paris est habitée à 95% de provinciaux qui sont montés dans la capitale pour travailler principalement. Il y a dans le spectacle des passages assez piquants envers les parisiens et pourtant les parisiens ont applaudi, même plus qu’ailleurs.
Ces gens assistent au spectacle, voient leurs vies à travers et se disent « merde, c’est vrai ça ! ». En humour, le spectateur aime bien rire de ses propres travers, même s’il les retrouve plus chez son voisin que chez lui-même.
Il y a une scène du spectacle dans laquelle Maria, pour éviter de travailler au jardin, dit : « On va refiler ça aux touristes. Les parigots qui viennent visiter nos campagnes ne demandent que de se foutre les mains dans la terre. Alors, non seulement ils vont faire notre jardin mais en plus ils vont payer pour le faire. Et pour te dire comme ils sont cons, ils vont repayer le soir pour manger ce qu’ils ont ramassé au potager ». Cette tirade nous a fait peur au départ face au public parisien et pourtant, elle est ovationnée.
Puis, après le sujet de la ruralité, le spectacle est surtout une histoire filiale qui est universelle. C’est le vrai fil rouge du spectacle.
Dans ce spectacle, vous critiquez quelques fois l’actualité ou la politique actuelle. Devez-vous dès lors adapter régulièrement vos textes ?
Bien entendu. Il y a des jours où nous voyons un sujet dans l’actualité qui nous interpelle et qu’il est impossible de ne pas aborder avec nos personnages. Nous adaptons dès lors le texte pour plaire au public puis, au bout de deux jours, cela fait moins rire, alors nous l’enlevons. Il y a certains moments dans le spectacle où nous pouvons ajouter des choses si nous le voulons.
Cela dit, le spectacle n’est pas du tout créé dans cette optique.
Vu le nombre de spectacles et les histoires qui s’enchainent, avez-vous encore facile de vous renouveler, de trouver de nouvelles frasques ?
C’est difficile de trouver à chaque fois une histoire qui fonctionne bien. Il faut chaque fois rester au même niveau.
Pour cela, nos personnages nous aident énormément. Ils sont devenus des entités autour desquelles nous devons trouver de nouvelles situations. Alors, les dialogues sont toujours des moments très agréables dans l’écriture. Le plus difficile, c’est de trouver le scénario, l’histoire principale. D’autant plus que les histoires se suivent. Il faut donc rester cohérent.
Et, a contrario, il faut aussi qu’un spectateur qui nous découvre pour la première fois adhère au duo sans avoir vu les spectacles précédents.
En 2008, vous avez fait votre apparition au cinéma avec Mariage chez les Bodin’s. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Nous l’avons filmé façon Strip-Tease, caméra à l’épaule où l’on entre chez des gens qui nous racontent leur vécu. C’est voulu car l’émission nous a beaucoup fait rire tant elle nous emmène dans des situations insensées.
Il paraitrait même que votre film est le second plus rentable de France. Pouvez-vous nous expliquer cela ?
Oui, c’est tout à fait vrai, juste derrière Bienvenue chez les Ch’tis. En fait, cela est dû au fait que nous avons tourné ce film avec sept ou huit personnes et qu’il a coûté en tout 90.000 €, c’est-à-dire rien. Avec cela, nous avons fait 150.000 entrées. La proportion a donc fait de ce film le second film le plus rentable en France.
À côté de cela, nous avions la grande chance d’être déjà connus en France et d’avoir un public fidèle qui a été voir le film.
Cela nous a permis de financer le deuxième film, Amélie au pays des Bodin’s, qui a été présenté à Cannes et à Gérardmer. Là, nous nous sommes tout de même demandés ce que l’on foutait là, entre Luc Besson et les autres.
Finalement, ce sont les idées qui comptent plus que le déploiement d’argent comme Benoit Poelvoorde avec C’est arrivé près de chez vous.
Une grand humilité en fait ?
Dans notre métier, si tu banalises ce qui t’arrive, tu ne t’épates plus de ce que tu vis. Dès cet instant, tu vas devenir moins drôle et tu n’es plus satisfait de ce tu écris. Tu deviens aigri.
De notre côté, nous enchainons les zéniths mais, à chaque fois que l’on arrive dans une salle comme celle-là, nous sommes comme des enfants car ce que nous vivons est génial, ce sont des cadeaux du ciel.
L’humilité vient peut-être du fait que nous avons mis du temps à arriver là où nous sommes. Alors que de nos jours, des gamins sont propulsés directement de l’écran à ces énormes salles. Il faut pouvoir assumer cela.
Vous organisez également un festival bien à vous qui s’appelle Grandeur Nature…
Alors, ce n’est pas un festival en soi, c’est davantage un spectacle avec différents comédiens qui sont invités. Cela se déroule dans la cour d’une ferme où nous accueillons 25.000 personnes durant le mois de juillet. 25 représentations face à un gradin de 1000 places.
C’est une expérience incroyable et l’une de nos plus grandes fiertés car les dates se remplissent en 15 jours chaque année sans aucune promotion.
À l’époque, on nous avait pris pour des fous car c’est une grosse structure. Il y a un grand décor, une dizaine de comédiens, 50 techniciens, 120 bénévoles, etc. Dès la première année, c’était plein grâce uniquement au bouche-à-oreille.
Pour l’anecdote, nous avions fait une campagne d’affichage la deuxième année car la région voulait participer et nous aider. Mais elle avait à peine acheté la campagne d’affichage que le spectacle était déjà complet. Nous avons donc mis sur les affiches « complet ! merci et rendez-vous l’année prochaine ». (rires)
Avez-vous déjà joué l’un de vos spectacles en Belgique ?
Oui mais de manière très ponctuelle. Nous avons joué trois fois au Centre Culturel d’Auderghem, nous avons également fait le VooRire à Liège et à Rocherfort.
Mais à chaque fois, nous avons senti que le public belge était notre public. La réaction des gens est géniale. Ils ont envie de rire et ils ne regardent pas leur voisin pour savoir s’il rigole lui aussi.
C’est pour cela que nous nous sommes alliés aux Frères Taloche. Nous avons hâte de revenir.
Propos recueillis par Matthieu Matthys.
Les Bodin’s, Retour au Pays :
- 22 Avril 2014 au Théâtre 140 à Bruxelles
- 23 avril 2014 à la Maison de la Culture de Namur
- 24 avril 2014 au Centre Marius Staquet à Mouscron
- 25 avril 2014 au Grand Théâtre de Verviers
- 26 avril 2014 au Wex de Marche-en-Famenne
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